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Lettre ouverte - Aurons-nous droit à un vrai plan de lutte contre la pauvreté ?

06 juin 2024

Image Lettre ouverte - Aurons-nous droit à un vrai plan de lutte contre la pauvreté ?

La plupart de nos organismes ont participé activement à la mobilisation qui a mené, en 2002, à l’adoption de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Une loi imparfaite, mais qui a le mérite d’engager le gouvernement à « amener progressivement le Québec […] au nombre des nations industrialisées comptant le moins de personnes pauvres », et ce, dans la perspective de « tendre vers un Québec sans pauvreté ».

Encore aujourd’hui, nous portons cet idéal d’un Québec sans pauvreté. Il va sans dire que nous attendons avec impatience le dépôt du quatrième plan de lutte contre la pauvreté, que la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, Chantal Rouleau, doit déposer avant la fin du mois de juin.

Notre message n’a pas été entendu

Nous faisons partie des centaines d’organismes qui ont participé à la consultation gouvernementale et qui ont multiplié les représentations auprès de la ministre pour lui rappeler l’urgence de doter le Québec d’un plan d’action gouvernemental ambitieux, qui nous permette enfin de tendre vers une société sans pauvreté.

Chaque fois, la ministre nous a assurés qu’elle avait entendu notre message et que sa réponse viendrait dans le prochain plan d’action. Or, voilà, nous y sommes. Mais malheureusement, tout porte à croire qu’elle a mal compris notre message ou, du moins, qu’il ne s’est pas rendu à ses collègues au gouvernement.

Le budget déposé le 12 mars dernier annonçait l’investissement de 784 millions de dollars pour les cinq prochaines années afin de « réduire la pauvreté et favoriser l’inclusion sociale ». Selon toute vraisemblance, il s’agit là du coeur du prochain plan d’action. C’est presque quatre fois moins que ce qui était alloué dans le précédent plan d’action.

Pour l’essentiel, le gouvernement s’est contenté de reconduire des mesures existantes. La seule nouveauté, c’est la possibilité pour les personnes aux programmes d’aide sociale et de solidarité sociale de conserver 10 % de leurs gains de travail excédant les revenus de travail permis. Une mesure ridicule et insultante, qui ne concerne actuellement qu’environ 1 % des personnes assistées sociales.

Ce manque de vision est d’autant plus choquant dans le contexte actuel. Alors qu’il est de plus en plus difficile de trouver des logements abordables, que l’itinérance et l’insécurité alimentaire augmentent de façon soutenue, le gouvernement n’a-t-il vraiment rien de mieux à proposer pour « réduire la pauvreté » ?

Il n’est pas trop tard

Aujourd’hui, nous unissons nos voix pour demander au gouvernement de prendre un pas de recul d’ici le dépôt du plan de lutte contre la pauvreté. Il n’est pas trop tard pour qu’il décide d’assumer ses responsabilités et nous propose un plan d’action à la hauteur des besoins.

Pour commencer, le gouvernement devrait prioritairement augmenter les revenus des personnes qui n’arrivent pas à couvrir leurs besoins de base. Peut-on croire qu’au Québec, en moyenne, une personne sur dix n’arrive pas à couvrir ses besoins tels qu’ils sont définis par la Mesure du panier de consommation ? Rappelons qu’il est ici question du minimum vital, de ce qui est nécessaire pour vivre en santé. Permettre à l’ensemble des Québécoises et des Québécois de couvrir leurs besoins de base, c’est le premier pas vers un Québec sans pauvreté. Cela pourrait se faire en augmentant les prestations d’assistance sociale et le crédit d’impôt pour solidarité.

Une hausse substantielle du salaire minimum est également nécessaire, car même des personnes travaillant à temps plein vivent dans la pauvreté. Un nombre croissant de travailleuses et de travailleurs doivent d’ailleurs avoir recours aux banques alimentaires.

Parallèlement à cela, le gouvernement doit s’attaquer à la crise du logement. On sait que le loyer représente le principal poste budgétaire des personnes en situation de pauvreté et qu’il est de plus en plus difficile pour elles de trouver un logement abordable qui réponde à leurs besoins. Ainsi, le gouvernement devrait soutenir massivement la construction de logements sociaux et assurer un contrôle des loyers du marché privé.

Évidemment, la lutte contre la pauvreté est indissociable de services publics forts et accessibles. Ceux-ci permettent aux personnes en situation de pauvreté de bénéficier de biens et de services auxquels elles n’auraient pas accès autrement. Un plan de lutte contre la pauvreté digne de ce nom devrait donc chercher à améliorer l’accès aux services publics et cela passe pour beaucoup par un réinvestissement. Cela peut aussi passer par une offre élargie de services, par exemple en matière de soins dentaires ou de transport collectif.

Nous défendrons notre idéal

La ministre Rouleau a suscité énormément d’attentes chez les personnes en situation de pauvreté depuis le début de son mandat. Malheureusement, rien ne laisse croire qu’elle livrera la marchandise.

Souvenons-nous que les trois premiers plans de lutte contre la pauvreté, même s’ils n’ont permis que de timides avancées, ont au moins assuré la mise en oeuvre de certaines mesures structurantes, comme le soutien aux enfants, le crédit d’impôt pour solidarité et le programme de revenu de base. Se pourrait-il que nous n’ayons même pas droit à une telle mesure dans le quatrième  plan de lutte contre la pauvreté ?

Nous avons hâte de voir. En attendant, nous nous préparons à relancer la mobilisation avec le Collectif pour un Québec sans pauvreté pour nous assurer que notre message est entendu et pour défendre notre idéal d’un Québec sans pauvreté, plus égalitaire et riche de tout son monde.

Cette lettre est parue dans Le Devoir le 6 juin 2024.

Marie-Line Audet, Denis Bolduc, Jocelyne Gamache, Caroline Senneville et Luc Vachon

Les auteurs sont respectivement directrice générale de la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC) ; secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) ; coordonnatrice générale du Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) ; présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) ; président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD). Ils font partie du Collectif pour un Québec sans pauvreté avec qui ils cosignent cette lettre.*

*Ont cosigné ce texte :

(Groupes nationaux) Alain Ambeault, csv, directeur général de la Conférence religieuse canadienne ; Marie-Line Audet, directrice générale de la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC) ; Thomas Bastien, directeur général de l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ) ; Mario Beauchemin, 3e vice-président de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) ; Peter Belland, président du CA du Regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (RRASMQ) ; Denis Bolduc, secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) ; Patrick Bydal, vice-président à la vie politique de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) ; Émilie Charbonneau, 2e vice-présidente de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) ; Vincent Chevarie, responsable des dossiers politiques et des communications d’Au bas de l’échelle ; Paule Dalphond, directrice générale du Regroupement des Auberges du coeur du Québec (RACQ) ; Sylvain Dubé, directeur général du Réseau communautaire en santé mentale (COSME) ; Mariepier Dufour, directrice générale de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec (FAFMRQ) ; Martine Fillion, présidente du Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec (RGPAQ) ; Jocelyne Gamache, coordonnatrice générale du Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) ; Micheline Germain, présidente de l’Association des retraitées et retraités de l’éducation et des autres services publics du Québec (AREQ-CSQ) ; Michel Girard, vice-président, responsable de la défense des services publics du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) ; Richard Gravel, directeur général du Collectif des entreprises d’insertion du Québec ; Valérie Lépine, cocoordonnatrice du Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MÉPACQ) ; Mélanie Mailhot, coordonnatrice du Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et CIUSSS (RQIIAC) ; Daniel Marineau, représentant national d’ATD Quart Monde ; Natalie Pouliot, directrice générale de la Coalition des organismes communautaires pour le développement de la main-d’oeuvre (COCDMO) ; Françoise Ramel, vice-présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), secteur sociopolitique, Solidarité, coresponsable Condition féminine ; Caroline Senneville, présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) ; Catherine Tragnée, organisatrice communautaire, Front commun des personnes assistées sociales du Québec ; Luc Vachon, président de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) ; Stéphanie Vallée, cocoordonnatrice de l’R des centres de femmes du Québec.

(Collectifs régionaux) Alison Beaumont, Comité pour un Québec sans pauvreté Saguenay—Lac-Saint-Jean ; Marc Benoît, coordonnateur du Regroupement des organismes d’éducation populaire autonome de la Mauricie (ROEPAM) ; Sylvain Caron et Johanne Saint-Denis, Collectif anti-pauvreté de Lanaudière ; Michel Dubé, Regroupement contre l’appauvrissement Rimouski-Neigette ; Rosalie Dupont, cocoordonnatrice de la Table d’action contre l’appauvrissement de l’Estrie (TACAE) ; Louise Gallien, Collectif Gaspésie-Les Îles pour un Québec sans pauvreté ; Josée Harnois, porte-parole de la TROVEP Montérégie ; Nancy Hubert, coordonnatrice de l’Association des groupes d’éducation populaire autonome Centre-du-Québec (AGÉPA) ; Laurent Lévesque, Collectif de lutte et d’action contre la pauvreté de la région de Québec (CLAP 03) ; Anick Lorrain, présidente du CA du Conseil régional de développement social des Laurentides ; Marise Proulx, Groupe de réflexion et d’action contre la pauvreté de Chaudière-Appalaches (GRAP) ; Annie Savage, directrice du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal (RAPSIM) ; Michel Savard, coordonnateur de la Table des groupes populaires de la Côte-Nord.

 

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