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Dossier de l'heure


Programme québécois pour les troubles mentaux

Quand le gouvernement fait mine de s’attaquer à la crise de santé mentale

Créé en 2018 avec pour intention d’améliorer l’accès à la psychothérapie, le Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM) est un modèle standardisé de soins par étapes d’intensité variable, allant des autosoins, du monitorage en continu et des groupes de soutien à la psychothérapie. Alors que le programme s’implante progressivement et que le gouvernement entend le déployer dans tous les établissements du réseau de la santé et des services sociaux, des voix s’élèvent pour remettre en question son efficacité et en souligner les limites. Un sondage mené auprès de 3000 membres œuvrant en santé mentale - dont plus de 700 pratiquent déjà dans le cadre du PQPTM - nous révèle que celui-ci nuirait même au traitement de différents troubles de santé mentale.

FAITS SAILLANTS DU SONDAGE MENÉ PAR L’APTS  

Photo caroussel - Programme québécois pour les troubles mentaux
Photo caroussel - Programme québécois pour les troubles mentaux
Photo caroussel - Programme québécois pour les troubles mentaux
Photo caroussel - Programme québécois pour les troubles mentaux
Photo caroussel - Programme québécois pour les troubles mentaux

 

PQPTM : ON VOUS CONSULTE

Vous travaillez en santé mentale? L’APTS vous invite à partager vos réflexions sur vos conditions de pratique et d’exercice dans le cadre de consultations présidées par Benoit Audet, 3e v.-p. de l’APTS. Votre contribution permettra notamment de cerner les enjeux touchant le Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM).

4 régions ont été ciblées pour cette mini-tournée:

  • 2 février  | Montréal (Nord-de-l'île-de-Montréal et Centre universitaire de santé McGill)   
  • 15 février| Chaudière-Appalaches
  • 22 février| Estrie
  • 9 mars     | Mauricie-Centre-du-Québec

Les membres concerné·e·s recevront prochainement une invitation détaillée de leur exécutif local avec tous les détails pour participer à ces rencontres.

 

QUELS RISQUES POUR L’USAGER·ÈRE?

Une mauvaise appréciation

La prise en charge débute par une appréciation des symptômes de la personne concernée, qui doit être effectuée au moyen d’un outil ou d’un logiciel d’aide à la décision. Ainsi, en fonction des symptômes et de l’algorithme décisionnel prévu, l’usager·ère sera vraisemblablement dirigé·e vers la première étape du PQPTM, en basse intensité de traitement. 

Or, il ne faut pas confondre une appréciation et une évaluation de la personne. De plus, l’intervenant·e n’est pas forcément habilité·e à procéder à une évaluation du trouble mental ou à une évaluation de l’état mental d’une personne préalable diagnostiquée d’un tel trouble. À noter toutefois que les titres d’emploi qui remplissent les conditions d’accès à un permis de psychothérapeute peuvent être habilités, lorsque cela relève de leur champ d’exercice, à évaluer l’état mental d’une personne.  

Des troubles mentaux écartés

Les symptômes auxquels s’intéresse le PQPTM sont essentiellement issus des troubles anxieux ou dépressifs, du trouble obsessionnel-compulsif et du stress post-traumatique. Il est surprenant de constater que les troubles concomitants (santé mentale et dépendance) et les comorbidités ne sont pas pris en compte. De plus, et alors que la majorité des personnes suivies en psychothérapie au public présentent des troubles chroniques, le PQPTM semble viser les troubles ponctuels ou temporaires. Or les problèmes chroniques nécessitent plus de temps, de souplesse et d’intensité de service. Le PQPTM n’est pas conçu à cet effet puisqu’il préconise une approche brève dans un cadre fixe, limité à 10-15 séances.

Une trajectoire de soins inappropriée

Les limites précédemment citées exacerbent les risques de trajectoire de soins inappropriée. Par exemple, une mauvaise appréciation constitue un danger réel en masquant potentiellement la complexité du cas. Il en résulterait une offre de soins et services inadéquate, qui pourrait avoir de lourdes conséquences. Parmi elles, citons notamment la fausse prise en charge de la personne, le risque qu’elle soit retirée de la liste d’attente en psychothérapie, la dégradation de son état mental et la survenance du phénomène des portes tournantes. En Grande-Bretagne, le gouvernement a d’ailleurs lui-même conclu que 50% des patient·e·s pris·es en charge dans le cadre de l’approche IAPT n’auraient pas montré d’amélioration alors que d’autres études démontraient un taux de rétablissement se situant entre 10% et 22%. 

 

QUELS RISQUES POUR LE·LA PROFESSIONNEL·LE?

Des manquements déontologiques forcés

Ce qui précède est en contradiction flagrante avec les obligations déontologiques des psychologues et des titulaires de permis de psychothérapeute. Par exemple, l'approche cognitivo-comportementale en est une parmi d’autres, mais elle est la seule approche autorisée. Certain·e·s professionnel·le·s n’ont pas la formation nécessaire pour l’appliquer; y recourir malgré tout les amènerait à déroger de leur code de déontologie. 

Une menace à l'autonomie et au jugement professionnel

Toutes ces limitations empiètent également sur le jugement clinique des intervenant·e·s et nient leur autonomie professionnelle. On craint aussi que l’évaluation et l’orientation au Guichet d’accès en santé mentale adulte soient teintées par l’objectif d’exclure la psychothérapie du plan de traitement en forçant les approches de basse intensité. De ce fait, il s’agit là d’un exemple patent de dévalorisation des professions.

Le spectre de la surcharge et de la détérioration du climat de travail

À la suite de l’implantation de l’IAPT, les psychologues britanniques auraient vécu un réel traumatisme, ceux-ci et celles-ci rapportant que l’IAPT a modifié profondément les services en santé mentale et en a réduit la qualité. De plus parmi les intervenants de l’IAPT on observe un taux d’épuisement professionnel de 50 % à 68 % selon une étude de 2017. La mécanisation des tâches et la pression organisationnelle pour prendre en charge un maximum de cas en seraient les causes. 

Cette pression aurait aussi altéré le climat de travail en réduisant la coopération entre professionnel·le·s. On sait en effet que le soutien clinique, la discussion entre professionnel·le·s et la variabilité des tâches favorisent un climat de travail sain. Or les équipes ont rapporté que ces éléments se faisaient de plus en plus rares au sein de l’organisation des soins en santé mentale. 

NOS RECOMMANDATIONS

  • Que le PQPTM ne nuise pas davantage à la santé mentale de la population;
  • Qu'il ne restreigne pas l’autonomie professionnelle de nos membres;
  • Qu’il ne les place pas en porte-à-faux avec leurs obligations déontologiques.

 

Le saviez-vous?

Le PQPTM est un dérivé de l’IAPT (Improving access to psychological therapies), un programme similaire implanté en Angleterre et qui est loin d’avoir fait l’unanimité. En plus de se voir reprocher de ne pas soigner adéquatement les personnes dans le besoin, il a été dénoncé pour avoir engendré une augmentation des coûts, une accentuation de l’épuisement professionnel du fait du haut volume de traitement ainsi qu’un taux élevé d’abandon chez les usager·ère·s.

L’APTS à vos côtés

Vous offrez des services en santé mentale? Le PQPTM est en cours d’implantation ou déjà implanté dans votre établissement? Si vous considérez que votre autonomie professionnelle n’est pas respectée dans le cadre de la mise en œuvre du programme, votre équipe locale peut vous soutenir afin que l’organisation du travail se conforme à vos devoirs déontologiques.



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